Le coup d'envoi du Championnat 98 en Australie marque un tournant historique. Alain Prost présente l'AP 01, sa première voiture, à Melbourne. En exclusivité, le jeune patron d'écurie nous présente ses ambitions, prudentes mais déterminées.

En 1997, Prost Grand Prix a roulé en Ligier-Honda. Tout au long de la saison, les techniciens dirigés par Loïc Bigois ont mis au point l'AP 01 (Alain Prost 01). Cette F1 est la première de l'histoire de cette écurie française, équipée à partir de cette année d'un moteur Peugeot.

Quel bilan tirez-vous de votre saison passée?
Pour le négatif, il y a l'accident d'Olivier Panis, heureusement sans conséquences graves. Dans l'ensemble, c'est très positif. Le rachat de l'équipe Ligier ne s'est effectué que quelques semaines avant le début du Championnat 97, en février. Sur un plan sportif, nous avons fait parler de nous. On a obtenu des résultats que nous n'espérions pas en début de saison.

Vous connaissez parfaitement le monde de la Formule 1: votre nouveau métier vous a-t-il quand même surpris?
La chose la plus surprenante est la quantité de travail qu'il faut fournir pour résoudre tous les problèmes qui surviennent. Quand un problème est résolu, deux autres arrivent...

Qu'avez-vous travaillé le plus cet hiver?
Nous avons eu deux priorités: terminer l'élaboration de l'AP 01 et former les 80 personnes embauchées en l'espace de six mois. Sur le plan technique, nous avons mis au point une nouvelle boîte de vitesses longitudinale.

Combien employez-vous de personnes au sein de l'écurie Prost Grand Prix?
150, mais je pense que nous atteindrons le chiffre de 170-180. C'est une première grosse étape qu'il faut digérer. Nous avons encore plus de temps à consacrer aux problèmes qui se posent plutôt qu'à construire.

Cela vous place où par rapport aux plus grosses écuries?
Il y a 240 personnes chez Williams. Je ne pourrai pas développer mon équipe jusqu'à ce chiffre: les coûts de masse salariale son plus élevés en France qu'en Grande-Bretagne.

On évoque depuis longtemps le déménagement de Magny-Cours. Qu'en est-il?
En mars, nous nous installerons à Guyancourt, dans les Yvelines. Le site sera vraiment opérationnel à partir d'avril.

Vous inaugurez cette année votre partenariat avec Peugeot. Cette alliance avec une grande marque était-elle impérative?
Il n'y a pas moyen d'être compétitif si on n'est pas associé à un grand constructeur. Ce partenariat avec Peugeot a été un élément déterminant. Nous travaillons ensemble pour un partenariat très étroit. Peugeot n'a jamais gagné en F1. C'est un challenge pour eux autant que pour nous, c'est très intéressant pour la motivation de l'équipe.

Quels sont vos objectifs cette année?
Je n'ai pas d'objectif précis en terme de victoire. L'essentiel est de construire une équipe de haut niveau.

Vous ne pensez pas pouvoir prétendre à un succès dès cette année?
Peut-être, ce serait bien, mais ce n'est pas le plus important. L'essentiel est de construire une écurie de haut niveau. L'objectif principal est de figurer dans les années à venir parmi les trois ou quatre meilleures écuries du plateau. La seconde priorité étant d'assurer la pérennité de l'équipe. Nous arriverons peut-être à gagner une course cette année, mais ce sera très difficile.

Vous avez essayé l'AP 01?
(Un sourire.) Non, je la réserve aux pilotes.

Vous n'en éprouvez pas l'envie?
Pas vraiment. Si j'en ai l'occasion, je ferai prochainement quelques tours, mais ce ne sera pas uniquement pour le plaisir. Ça me permettra de mieux appréhender les comptes rendus des pilotes lors des briefings.

Propos recueillis par
Jean-Marc Barenghi